Dans le cadre de sa vente de dessins qui se déroulera le 17 novembre 2016, la maison Tajan proposera aux enchères la bibliothèque de l’écrivain surréaliste Jean Carrive réunissant 115 numéros.
Importante redécouverte pour le marché des livres, documents et autographes surréalistes, cette dispersion révélera entre autre un ensemble inédit de 16 correspondances de 1923 à 1933 entre Jean Carrive et André Breton, qui témoigne de l’amitié entre les deux hommes.
Extrait du n° 407 de la vente :
André Breton – L.A.S. À Jean Carrive. Paris, 1er octobre 1924.
Breton remercie Carrive de sa correspondance, et souhaite l’associer à la publication du Manifeste du Surréalisme : (…) Vous verrez, par la préface à mon livre : Manifeste du Surréalisme – Poisson soluble, qui va paraitre ce mois-ci, que je ne vous oublie pas et que je pense toujours à vous avec affection (…). Breton se montre impatient de le revoir à Paris : Qu’est ce que cet examen qui vous retient ? Qui sait si bientôt il ne sera pas trop tard ? L’idiotie, le gâtisme avancent à grands pas et font de plus en plus de ravages dans nos « rangs » (…). Eluard est rentré hier à Paris sans crier gare (et pourtant, il y avait de quoi). Enfin… je suis fâché avec Desnos. Aragon est à Commercy. Avez-vous lu les lettres d’Artaud dans la N.R.F. Parlez-moi sans crainte, même de moi si vous jugez qu’il y a matière. Je n’ai pas cessé de vous écouter (…). Il remercie Picon de son article qu’il a pu dé- chiffre, lui indique la parution du très beau livre de Limbour, illustré par Masson, etc.
Dans cette vente également des correspondances de Robert Desnos, Monny de Boully, Pierre Emmanuel, Jean Pauhlan ainsi que des manuscrits et tapuscrits de Carrive concernant son travail de traduction et d’analyse des oeuvres de Kafka dont il fut l’un des principaux traducteurs.
La vacation comportera également un dessin de Pierre Koslovski son fidèle ami « Portrait de Jean Carrive » et un rare dessin de son célèbre frère Balthus.
Le dernier chapitre de la vente est consacré aux livres dont certains sont enrichis d’envois. L’un des plus remarquable de cette vacation est le n° 501 de la vente :
« La révolution surréaliste ».
Cet exemplaire unique rassemble d’importants documents, tracts et revues surréalistes ayant marqué l’histoire du mouvement, certains avec envois ou inscriptions manuscrites.
Biographie de Jean carrive (1905- 1963)
Né dans une famille de protestants modestes, Jean Carrive exprime très tôt un goût profond et des dispositions inhabituelles pour la littérature. À l’âge de 15 ans, il écrit à André Breton, qui le fascine, et celui-ci devine chez ce jeune garçon un être d’exception. Il l’invite à Paris en 1923 et l’inscrit dès l’année suivante parmi les 19 disciples du Manifeste du Surréalisme qui ont « fait acte de surréalisme absolu » : il est rangé aux côtés d’Aragon, de Crevel, Desnos, Soupault, etc. Mais l’engagement auprès du groupe, trop exigeant pour un esprit libre comme Carrive, sera brisé après les conflits qui secouent le Bureau de recherches surréalistes à la fin des années vingt.
Breton l’engage à s’intéresser à la littérature allemande et il part poursuivre ses études en Allemagne où il rencontre Charlotte Berendt, une jeune étudiante en droit d’origine juive, convertie au protestantisme. En 1933, Jean Carrive pressent le danger et emmène la jeune femme en Gironde où ils finiront leur vie après de brefs passages en Allemagne.
Le couple a consacré sa vie à des travaux intellectuels sur les théologiens germanophones, sur Rilke ou surtout sur Kafka. Les amitiés fidèles avec Pierre Klossowski et son frère Balthus, avec Monny de Boully, avec Pierre Leiris ont laissé des marques émouvantes dans les correspondances et les livres qu’on trouvera décrits dans ce catalogue.